Créer le cercle vertueux
Les ventes sont
modestes, voire mauvaises. Les livres sont trop chers. Il n’y a pas assez de
visibilité pour les jeux de rôles en boutiques. Tout ça à cause des magasins
qui laissent moins de place à notre hobby ; non c’est à cause des shops-online…
non, répondraient les vendeurs de jdr, c’est que les clients en achètent peu,
donc ça prend de la place par rapport à ce qui rapporte. Un jeu de rôle plus
épais qu’une boite de jeu de plateau ? Les créatifs ne font rien de leurs
journées. Les parutions sont tout le temps en retard. Le magazine dit du mal ou
est trop gentil avec telle ou telle parution…
Oui, le rôliste est râleur. On utilise d’ailleurs le terme
« râliste » parfois. Soyons limpide, aucune grosse société ne fera un
super marché de jdr. Ça
n’ira pas forcément mieux à l’avenir, les années royales du jdr sont passées.
Oui, enfin pas forcément. Si nous prenons les choses en mains nous pouvons
faire bouger les choses, même juste un peu. Pour avancer, la roue a besoin
d’avoir un mouvement d’initié.
Regardez le schéma ci-dessous. Comme vous pouvez le voir, le
bout de chaîne est le « créatif ». La réalité fait qu’il est (j’en
parle au singulier et au masculin, même si c’est souvent une équipe pouvant
comporter des créatrices) celui qui gagne le moins d’argent dans la chaîne
éditoriale. De ce fait, il est obligé de créer sur son temps personnel (ne
pouvant pas vivre de ses publications rôlistiques). Ce qui peut engendrer
souvent des retards. Il en est aussi généralement de sa poche pour se rendre en
convention et faire la promo de son jeu. Il a donc encore moins de temps pour
créer… et ainsi de suite.
Comment inverser la tendance ? Comment créer un cercle
vertueux ?
Il n’y a pas de solution miracle, mais peut être des pistes
à creuser. Celui qui décide, en fin de compte, c’est le joueur. Joueurs et
joueuses sont les moteurs de cette petite industrie du jeu de rôles. Mais les
portefeuilles de ceux-ci sont limités. Cependant, si tout le monde fait un pas
curieux vers les livres qui sortent, cela diversifie les possibilités de jeux,
augmente les ventes, et alimente le circuit jusqu’au créateur, qui peu alors
proposer autre chose. C’est le schéma le plus basique, mais allons chercher
plus loin.
Les clubs de JDR
(pour tous)
Les clubs sont des associations subventionnées par les
adhérents, mais aussi possiblement différentes structures institutionnelles
comme les mairies, voire pourquoi pas les régions. Comparativement, la manne
financière est plus importante dans ce pot commun. Donc, au lieu de racheter la
énième version d’un jeu, trois paquets de chips et une boisson gazeuse pour la
partie du samedi, pourquoi ne pas demander au trésorier d’établir un budget
d’achats de jdr. Pas si compliqué : un pourcentage de chaque adhésion est
dédiée à cet achat, qui peut être trimestriel ou mensuel. La constitution d’une
ludothèque est aussi le moyen de développer le marcher, mais aussi la curiosité
de chacun, découvrir des nouveaux jeux, les tester, voire les utiliser comme
aide de jeu pour des campagnes en cours. C’est un peu comme deux clics
Internet, sauf que là, vous ouvrez la porte de l’armoire pour avoir les livres
et choisir. L’association est avant tout une structure collective qui avec
ces achat peut prêter les livres, voire, si les joueurs achètent leur propre
exemplaire, il y en a toujours un « de secours » au club en cas d’oubli.
Probablement que les clubs souligneront
leurs maigres finances. De l’argent, il y en a.
Mais où trouver de l’argent pour tout ça ?
La mairie. Il est normal de demander des subventions à sa
mairie (voire à sa région) pour l’association. Il suffit d’éviter de dire
« on est une bande de copains, on joue. On veut de l’argent et une
salle ». Dans le procédé administratif, il y a plus de chance d’obtenir
des fonds en précisant que c’est une association loi 1901, structurée avec un
trésorier et tant d’adhérents. Les membres des regroupent régulièrement pour
des activités et partages ludique dans le cadre de parties de jeux de rôles (et
plateau ?). Mais pas seulement, vous avez quelques cartouches à utiliser
pour nourrir votre arme demandeuse de fonds : vous faites de l’initiation
et cela invite la jeunesse locale à venir découvrir de nouveaux horizon dans le
cadre sécurisé de la MJC (ou autre) ; vous pouvez vous référer à des
chiffres de joueurs ou association en France en allant piocher sur un site
comme celui de la FFJDR ; vous êtes prêt à faire des journées portes
ouvertes (vous partagez donc avec les habitants de la ville) ; voire comme
certaines associations le font déjà, vous participez à des actions du style
Téléthon ; n’oubliez pas non plus que le jdr ce sont des livres, et donc
que vous pouvez mettre en avant une politique d’achat de livre-jeu allant dans
le sens du développement du livre comme le souhaite forcément le Ministère de
la Culture et de la Communication. Mais
surtout, préparez tout cela avec un budget. Que cela soit envoyé par courrier
ou que vous obteniez un rendez-vous pour soutenir votre propos de demande de
financement, vous avez besoin de chiffres : nombre d’adhérents, nombre de
livres que vous comptez achetez annuellement pour l’association, etc. Et donc
que votre mairie vous subventionne ou non, rien ne vous empêche de continuer ce
cheminement à l’échelon au-dessus : la région. Dans les différents cas,
n’hésitez pas à prendre contact avec le conseiller à la culture local.
Enfin, vous pouvez aussi ajouter dans votre plan de
financement une éventuelle convention, c’est là que vous pourrez ajouter les
demandes d’argent pour pouvoir acheter des livres ou payer le déplacement
d’auteurs et illustrateurs. C’est aussi lors de cette convention que vous
pourrez vider un peu votre armoire à jeux de livres qui ne plaisent pas
forcément aux membres du club mais qui feront la joie des joueurs venus
ponctuellement. En plus, cela fait de la place pour accueillir de nouveaux
livres !
Note : chers membres des clubs de jdr, n’oubliez pas
que notre loisir est peu connu, si vous faites venir un auteur/illustrateur,
pensez à lui faire dédicacer un livre pour votre maire/conseiller à la
Culture/autre, car ça permet à la dite personne de savoir de quoi on parle,
c’est aussi un message qui souligne pourquoi il a pris la bonne décision en
vous faisant confiance pour cette dotation annuelle.
Être payé entre deux
livres de jdr (pour les auteurs/illustrateurs)
Le GEAR a déjà abordé le sujet des contrats et de leur
négociation. Je pars donc du principe que votre jeu est sorti et qu’on le
trouve en boutique. Vous êtes donc pleinement du côté de l’éditeur. Vous
fonctionnez ensemble pour que votre jeu se vende et plaise au mieux. La
meilleure chose est évidemment d’aller faire des démos lors de conventions et
dans les clubs près de chez vous. Pour cela, voyez si l’éditeur ne peut pas
aider d’une manière ou d’une autre ces déplacements. On ne parle pas d’un hôtel
5 étoiles mais même avec de maigres finances, il est possible d’offrir un
exemplaire ou deux de votre jeu à l’association qui va vous recevoir, voire une
participation au frais de train, co-voiturage ou autre. Mais si vous arrivez
avec un cadeau sur place, c’est aussi plus facile de voir avec l’association à
ce qu’elle participe aussi aux frais de votre venue d’une manière ou d’une
autre. Là encore je ne parle pas de luxe, mais de mise à disposition de lieu de
couchage, payement de la nourriture, etc.
L’éditeur a besoin que votre jeu soit vu et joué pour le
vendre. En dehors des déplacements, il reste donc Internet et les magazines. Le
premier est très aléatoire et la vie du Net, sur les forums ou les sites est
l’affaire de chacun. Vous appartenez à une communauté, parlez de ce que vous
faite, mais n’allez pas jusqu’à troller par trop de « mon jeu » sur
les sites. Ça crée
une overdose et peut devenir néfaste. Mais sur le Web il y a aussi des sites et
des webzines proposant des éléments pour les parties de jdr. Ils seront souvent
ravis d’avoir du matériel « officiel » de la part du créateur d’un
jeu. Donc oui cela demande du travaille, sauf si lors de la création du jeu
vous avez eu des coupes au montage : un paragraphe développant une idée
qui ne rentrait pas à la maquette, une illustration refusée par manque de
place, un scénar non validé qu’il faut retravailler une idée coupée à la
maquette qui donne une aide de jeu, etc. Et il y a aussi les magazines. Là, vous
pouvez trouver des accords avec eux, et donc avoir des créneaux pour proposer
du matériel « officiel » en plus d’être rémunéré. Vous devenez un
temps pigiste ! Les paiements ne sont pas démentiel, mais ça fait un plus
quand on écrit un scénario pour son jeu qui va apporter un plus pour tout le
monde : amener des joueurs à une table, faire jouer, donner de la visibilité au
jeu, etc. Pour les webzines, magazines, fanzine (il en reste un peu) qui ne
payent pas, pourquoi ne pas demander un geste à votre éditeur ou au ‘zine
? Il suffit d’une page de publicité pour le jeu, voire, pour l’éditeur qui ne
peut financer cette pub dans un magazine de vous payer en partie la création de
votre scénario/aide de jeu autrement : il a peut être dans sont catalogue
un jeu qui vous intéresse qui pourrait servir de paiement, faire en sorte
d’inclure ce fameux scénario dans un recueil à paraître, etc.
Je parle ici de pistes de recherche avec pour volonté de
créer un cercle vertueux poussant tous les professionnels et les joueurs à
tirer bénéfice de la situation. Si il y a une meilleure mise en avant d’un jeu,
l’éditeur gagne de l’argent, l’auteur aussi (bien que moins) mais avant tout,
sans auteur, il n’y a pas de livre. Alors oui, on pourra toujours vous dire que
plein de non professionnels sont sur le pas de la porte pour se faire publier à
l’œil. C’est vrai, mais le bénévolat à ses limites, celle du professionnalisme,
et donc celles qui feront qu’un éditeur vende des jeux de qualités et qu’on le
reconnaitra pour cela.
nb : ce billet est une base de recherche, pour les auteurs et illustrateurs faisant des interventions en dehors du jdr, je vous recommande de vous rendre sur le site de La Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse, qui donne les tarifs de base.